Max Ingrand (1908-1968), designer français et maître verrier, se forme à l'École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs avant de rejoindre en 1927 l'atelier de Jacques Gruber, renommé pour ses vitraux polychromes de l'époque Art Nouveau. Cette expérience fondatrice oriente Ingrand vers la création de vitraux, une discipline dans laquelle il obtient rapidement une renommée internationale. Il ouvre son propre atelier à Paris avec sa première épouse, Paule Rouquie, et se spécialise dans des œuvres à caractère religieux, mythologique et de décoration d'intérieur, utilisant des techniques sophistiquées de sablage et de gravure sur cristal, enrichies de placages d'argent et d'or.
Le travail de Max et Paule Ingrand attire l'attention de Gio Ponti, qui leur consacre un article dans "Domus" en 1936, année où certaines de leurs créations sont présentées à la Triennale de Milan. Parmi leurs œuvres notables figurent les aménagements des grands salons du paquebot Normandie, détruit en 1942 à New York, des interventions au Palais Royal de Bucarest, et les plafonds en miroirs décorés de la villa du Baron Empain à Bruxelles. Après la Seconde Guerre mondiale, Ingrand s'installe à Neuilly-sur-Seine avec sa seconde épouse et continue à développer son atelier parisien, qui s'agrandit pour accueillir jusqu'à cinquante ouvriers sous la direction de l'architecte Pierre Vago.
Progressivement, Ingrand élargit ses intérêts vers l'éclairage et le mobilier, créant des lampes en petites séries, des miroirs en cristal épais, des paravents, et des tables lumineuses. En 1954, il est nommé directeur artistique de Fontana Arte, un poste qu'il occupe jusqu'en 1967, sous l'impulsion de Gio Ponti et Pierre Vago, qui voient en lui l'héritier idéal de Pietro Chiesa. À Milan, Ingrand adapte les choix de production de Fontana Arte aux nouvelles exigences du marché tout en préservant les standards de qualité et de typologie qui ont fait la réputation de la maison.
Il met particulièrement l'accent sur le développement de l'éclairage, en introduisant des modèles novateurs qui marient judicieusement le cristal avec le laiton et l'aluminium, abandonnant progressivement le bois. Certains de ses modèles, comme la lampe-sculpture n° 2533 et la lampe à pied diffuseur opale n° 1853, restent emblématiques. Ses miroirs, souvent ornés de cristaux taillés tels des pierres précieuses ou dotés de bords « déchirés », connaissent également un grand succès, tout comme les grands lustres "Dahlia", symboles du luxe des années 1950 et 1960.
En 1958, lors de l'Exposition universelle de Bruxelles, une version unique de ces lustres est exposée. Durant les années 1960, Ingrand se consacre davantage à l'architecture intérieure, réalisant des projets prestigieux comme le hall de la RTF, le Palais Peugeot, et les fontaines du Rond-Point des Champs-Élysées à Paris. Après avoir quitté Fontana Arte en 1967, il poursuit son activité avec son atelier parisien et la société "Verre Lumière", fondée en partenariat avec Saint-Gobain et Mazda. Max Ingrand décède à Neuilly le 25 août 1969.